Bertrand Chamayou piano
Orch. National de France
Cristian Măcelaru direction
Journée Saint-Saëns #100
GUILLAUME CONNESSON Né en 1970
Feux d’artifice
CÉSAR FRANCK 1822–1890
Les Djinns, poème symphonique pour piano et orchestre
Variations symphoniques pour piano et orchestre
CAMILLE SAINT-SAËNS 1835–1921
Symphonie en fa Majeur « Urbs Roma »
Bertrand Chamayou, piano
Orchestre National de France
Direction Cristian Măcelaru
A l’occasion du 100è anniversaire de la mort de Camille Saint-Saëns
Variations symphoniques françaises
Guillaume Connesson : Feux d’artifice
« Cette partition écrite en 1998 (pour accompagner le film L’Aurore de Murnau) et révisée en 2003 (sous forme de suite symphonique) cherche à retrouver les sensations d’une grande fête populaire, avec ses couleurs, ses musiques qui s’entrechoquent, les rires, les cris d’enfants… Une palette bigarrée et jubilatoire, conçue comme un concerto pour orchestre, mettant en valeur chaque pupitre dans une écriture souvent virtuose. C’est l’énergie exubérante du rythme qui marque l’ensemble du mouvement. Après une introduction qui met d’emblée dans l’ambiance festive de l’œuvre, c’est un véritable kaléidoscope de thèmes qui se déploie — fanfares festives, syncopes jazzy et motifs populaires. Au milieu de la pièce se déroule une course poursuite dans la foule avec les sifflets des agents et pour finir tous les thèmes se superposent au moment où éclate le bouquet final. » (Guillaume Connesson)
César Franck : Les Djinns
Inspiré du poème de même titre issu du recueil Les Orientales (1829) de Victor Hugo, que Franck admirait profondément et dont il avait déjà mis en musique plusieurs autres textes pour ses mélodies avec piano, la pièce orchestrale intitulée Les Djinns relève du « poème symphonique », genre déjà illustré précédemment par Franck dans Le Chasseur maudit, et qui présente cette fois l’originalité d’une écriture pour piano principal et orchestre.
Le poème se distingue par sa forme en crescendo et decrescendo : les 15 strophes ont un nombre croissant puis décroissant de syllabes. En écho de ce récit du fracas provoqué par le passage d’un essaim de djinns autour de la maison du narrateur, ce poème peut aussi se lire, visuellement, comme un « calligramme » (poème dont la disposition des vers forme un dessin), suggérant la silhouette rebondie d’un djinn (génie des légendes arabes). Franck semble avoir tenté de reproduire par la musique cette dramaturgie, qui donne lieu ainsi à une sorte de « calliphone » : crescendo puis diminuendo de l’ensemble, à quoi s’ajoutent la tension grandissante entre piano et orchestre et leur dialogue.
César Franck : Variations symphoniques
Mises à part trois séries de « variations brillantes » composées en 1834 (à l’âge de douze ans), César Franck n’aborde la composition de variations orchestrales — genre à la fois difficile et académique — qu’en 1885, l’année qui suit la composition des Djinns. Lorsque l’on songe à l’ensemble des pièces pour piano que Franck a déjà composées à cette époque, on ne peut qu’être frappé par le ton de celle-ci : relativement anodine dans sa configuration thématique — deux brefs motifs de quatre mesures chacun. L’un, très affirmatif, est présenté à l’orchestre (certains commentateurs y entendent un écho du premier thème du finale du quatrième concerto pour piano de Beethoven). L’autre, plaintif, est présenté au piano solo. A partir de ce matériau assez pauvre, Franck élabore une œuvre ambitieuse. Une introduction présente les deux motifs et brode sur les diverses façons de les entremêler. Le grand pan central est constitué des six variations proprement dites. Et une séquence finale assez développée conclut l’œuvre avec une grande vitalité rythmique, presque martelée, d’une humeur joueuse assez inattendue chez ce compositeur.
Sur le plan pianistique, on remarque plusieurs univers de référence : celui de Bach, ce qui n’est pas étonnant chez cet admirateur de l’œuvre du Kantor, organiste lui-même et grand maître du clavier, celui de Schumann, comme souvent chez Franck, enfin celui de Beethoven — en particulier dans l’habileté à organiser et charpenter des motifs simples, pour susciter une dramaturgie efficace. L’œuvre a été créée le 1er mai 1886 à la Société Nationale de Musique, avec Louis Diemer, son dédicataire, au piano. Le compositeur dirigeait lui-même l’orchestre.
Camille Saint-Saëns : Symphonie « Urbs Roma »
Saint-Saëns est l’auteur de cinq symphonies ; seules trois d’entre elles portent un numéro. La Symphonie « Urbs Roma » n’en porte pas. En France au 19e siècle, la symphonie est d’abord un genre allemand – Haydn, Mozart et surtout Beethoven, un répertoire que l’on découvre dans les années 1830 grâce à la Société des Concerts du Conservatoire. Berlioz est le premier musicien à s’intéresser à ce genre, en solitaire et en sortant du modèle traditionnel, puisque toutes ses symphonies ont un argument extra-musical.
Quand Saint-Saëns compose sa Symphonie, « Urbs Roma » (la Ville de Rome), il est encore très jeune : 19 ans (la fameuse 3e Symphonie avec orgue, la plus connue de Saint-Saëns, est postérieure de plus de 30 ans). Son entreprise est originale et l’on peut dire qu’il y chez lui comme un « appel » de la symphonie. Rome, la Ville Éternelle, fascine tous les romantiques. S’ajoute chez Saint-Saëns le goût pour l’archéologie et les ruines (comme en témoignent ses voyages ultérieurs en Égypte pour les mêmes raisons) Dans la Symphonie « Urbs Roma », tout cela s’exprime par le monumentalisme (qui évoquerait bien sûr les édifices du monde romain). Mais l’œuvre peut rappeler également Harold en Italie de Berlioz (dans son mouvement lent, avec ses timbres champêtres). C’est à la fois la Rome antique et l’Italie contemporaine, l’histoire et la campagne. (Accessoirement, le thème de Rome peut être mis en relation avec le fait que Saint-Saëns a tenté le Concours de Rome par deux fois : la première, on estimera qu’il est trop jeune, la seconde, qu’il est trop vieux… )
H.P.
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