Jakub Józef Orliński contre-ténor
Il Pomo d’oro
Zefira Valova direction et violon
Alleluja
Airs d’oratorios baroques
JAN KŘTITEL TOLAR c1620-1673
Intrada (Adagio-Allegro)
Allemanda
JOHANN JOSEPH FUX 1660–1741
Non t’amo per il ciel, extrait de l’oratorio « Il fonte della salute »
ANTONIO LOTTI c1667-1740
Froh quanta sunt
NICOLA CONTI 1710–1754
Salve sis Maria
FRANCISCO ANTÓNIO DE ALMEIDA c1702-c1755
Giusto Dio, extrait de l’oratorio «La Giuditta 1726»
GAETANO MARIA SCHIASSI 1698–1754
A che si serbano
BALDASSARE GALUPPI 1706–1785
Concerto a 4 en ut mineur
LUCREZIO NUCCI c1584
Dal beato eccelso volo
ANTONIO VIVALDI 1678–1741
Peccator videbit
GIUSEPPE ANTONIO BRESCIANELLO c1690-1757/58
Ciaccona
GEORG REUTTER 1656–1738
D’ogni colpa la colpa maggiore
DAVID PEREZ 1711–1778
Gratias agimus tibi, extrait de la Messa a 5 voci
GEORG FRIEDRICH HAENDEL 1685–1759
Amen, Alleluia en ré mineur
Jakub Józef Orliński contre-ténor
Il Pomo d’oro
Direction et violon Zefira Valova
Si la France baroque s’enorgueillit de cultiver son propre style, le reste de l’Europe n’oppose aucune résistance à l’influence de l’Italie, pôle d’attraction qui attire la fine fleur des musiciens européens. Le Portugais Almeida, l’Autrichien Reutter, l’Allemand Händel (ensuite naturalisé anglais) y effectuent une partie de leur carrière. Et réciproquement, les compositeurs italiens travaillent à l’étranger, comme Conti et Vivaldi à Vienne, Schiassi et Perez à Lisbonne, Galuppi en Russie (au service de Catherine II), Brescianello à Munich et Stuttgart.
Dès lors, on ne s’étonnera pas de la prégnance du goût italien à Vienne, comme en témoignent la musique du Slovène Tolar et celle de Fux (maître de chapelle à la cour des Habsbourg).
Sous les voûtes des édifices religieux se déploient mélodies sensuelles et vocalises étincelantes, au départ stimulées par l’esthétique de la Contre-Réforme, mais bientôt adoptées en terres protestantes (l’« Amen, Alleluia » de Händel).
Dans la liturgie romaine, la place de premier plan occupée par le culte marial inspire des airs spirituels, comme ceux de Lotti et de Conti qu’Orliński a exhumés pour ce récital. Mais les églises ne sont pas seules à accueillir le répertoire sacré, chanté aussi dans des palais, surtout lorsqu’il s’agit d’oratorios. Le livret de ces œuvres s’inspire souvent de l’Ancien Testament (La Giuditta d’Almeida, La betulia liberata de Reutter, Il David trionfante de Nucci) ou du Nouveau avec, dans ce dernier cas, une prédominance des œuvres sur le thème de la Passion (Il fonte della salute aperto della grazia nel Calvario de Fux, Maria vergine al calvario de Schiassi).
Si le latin reste de mise dans les messes, motets et psaumes, le texte des oratorios, en revanche, est souvent en langue vernaculaire. Voilà qui renforce la proximité avec le monde de l’opéra, même si l’oratorio se distingue du théâtre lyrique par son sujet biblique, la présence de chœurs (quasi inexistants dans l’opéra italien de l’époque, où ils sont généralement interprétés par un regroupement de solistes) et l’absence de mise en scène.
Mais à l’écoute d’un air de soliste, si l’on fait abstraction des paroles, il est impossible de discriminer les deux univers, car la musique sacrée adopte les particularités stylistiques et formelles de son pendant profane. Ainsi, les airs se coulent presque toujours dans la structure d’une aria da capo (ABA), où l’interprète doit orner la mélodie de la dernière partie : un art dans lequel excelle Jakub Józef Orliński.
Et comme dans un opéra, il arrive qu’un instrument soliste dialogue avec le chanteur (le violoncelle dans « Non t’amo per il ciel » de Fux). En outre, les cérémonies liturgiques sont rythmées par des pièces instrumentales, certaines fondées sur l’écriture « sévère » traditionnellement associée au style d’église (le contrepoint, procédant par superposition de lignes mélodiques), d’autres empruntant leur schéma rythmique à une danse (le Balletto de Tolar, la Ciaccona de Brescianello).
Là aussi, le profane s’unit au sacré pour le noble divertissement de l’âme.
Hélène Cao
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